Conclusion

 

Nous nous sommes attaché, au travers de la chronique de cette maison, et des trois familles qui l'ont occupée sous l'ancien régime, Bonay, Calages, et Pagès Bannières, à montrer l'originalité de l'histoire même de Caraman et de son comté.

 

En effet, nous avons vu nos personnages jouer des conflits de juridiction entre celle des sénéchaussées de Toulouse ou de Castelnaudary, ou des intendances d'Auch, et de Montpellier. Seuls des robins savent se mouvoir dans ce maquis de pouvoir et de procédure. Nous avons été les témoins de la confusion des pouvoirs si chère à l'ancien régime, et que dénonceront plus tard les révolutionnaires de 1789. Jacques Calages, juge d'appeaux du comté de Caraman, magistrat instruit et juge, représente aussi sur place le seigneur, le comte de Caraman. A ce titre il exerce sa tutelle sur la communauté. Avocat au parlement, il plaide. Subdélégué de l'intendant, il est l'exécuteur des ordres du roi. Il concentre donc entre ses mains les pouvoirs judiciaires, administratifs, exécutifs, et même fiscaux ! En fait, pendant deux siècles, les pouvoirs, royal, ecclésiastique, parlementaire et seigneurial au lieu de s'opposer comme dans tant d'autres cités, oeuvrent dans le même sens, dans le but d'imposer à la communauté l'unité religieuse. Jacques Calages résistera à la réunion du comté au Languedoc, qui sera pourtant un bienfait pour les administrés, et le ménage Pagès Bannières en sera très amer quand elle se réalisera en 1779. Le comté de Caraman, et sa relative indépendance, devrait faire l'objet d'une étude dans le cadre de l'histoire des institutions.                            

 

Nous avons constaté la pérennité de la fortune terrienne, due principalement aux Bonay et arrondie par chaque génération, alors que la grosse fortune mobilière capitaliste des Fraxine ne survit pas à la révolution de 1789. L'approche économique, grâce au livre de comptes du XVIII° siècle, accuse le sous-développement du comté. Le protestantisme, vite oublié - il est incompatible avec les charges exercées - laisse cependant sa trace permanente dans les alliances, il nous conduit comme un fil d'Ariane jusqu'à la mère du peintre Eugène de Malbos. Peut-on parler d'ascension sociale ? L'évolution est lente et à peine perceptible. La famille, malgré les Pagès Bannières, reste bourgeoise, sans seigneurie, sans titres ; le port de la  particule et des armoiries relève de l'usage de la société. Cependant la maison se construit et s'aménage sur trois siècles, en suivant le bon goût de chaque époque.

 

 Nous n'avons pas jugé l'attitude des uns et des autres, faisant notre la maxime de Montalembert, citée en tête de l'ouvrage, car il est anachronique de projeter, sur les ancêtres, notre mentalité d'aujourd'hui. Que nous le voulions ou non, nous sommes les héritiers à la fois, de toutes les contradictions de l'Histoire, des oppresseurs et des opprimés. En revanche, nous avons voulu d'une manière, un peu sèche peut-être, évoquer les heurs et les malheurs de jadis.

 

Plan de Caraman

Dans l'ouvrage publié se trouve le plan de la ville de Caraman au XVIIIème siècle, les parcelles sont numérotées. Le numéro renvoie au nom du propriétaire.

 

Eugène de Malbos, Les Moulins de Montbel, 1841

Eugène de Malbos, Les Moulins de Montbel, 1841